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Fare Nanuu

Fare Nanuu

‘Arioi et fare ‘arioi

Baptisé Fare Nanuu, le fare ‘arioi de Arue a été inauguré officiellement le 20 mai 2022, à l’occasion de la célébration du Matari’i i raro.

Ce nom de Fare Nānu’u provient directement du nom du fare dédié à l’accueil des ‘arioi pour la zone de Tahiti (l’île en comptait cinq de ce type).

Son architecture triangulaire respecte sa destination de lieu de partage des connaissances et de creuset des savoirs.

On est là pour y enseigner, par le jeu, la danse, la déclamation, d’où cette disposition favorable à un orateur, ou un acteur, dévissant face à son public.

Sans paroi, entièrement ouvert, il permettait donc aussi de toucher des spectateurs restés à l’extérieur.

Construit par les habitants des lieux où ils étaient implantés, ces fare atteignait entre 55 et 90 mètres de long et leur dimension témoigne de l’importance sociale de cette confrérie.

On imagine donc aisément l’importance des délégations ‘arioi qui venaient s’y produire pour un public friand de ce genre de représentations.

Les premiers explorateurs occidentaux rendent compte de leur étonnement devant l’importance des flottes ‘arioi et de leur délégation.

Les représentations qu’ils donnaient duraient plusieurs jours, se pratiquaient principalement de nuit, et ouvraient la large palette des expressions culturelles. Elle allait de l’art oratoire sur les récits historiques codifiés et les contes, aux chants, aux saynètes satiriques, aux danses, voire aux bacchanales.

Le tout reposait sur la mémoire de ce qui composait l’essence même de la culture polynésienne.

L’arrivée même des ‘arioi, très codifiée, était l’expression vivante d’une culture revendiquée. Leurs parures, comme leurs tatouages, répondaient à une iconographie précise. Leur tournée correspondait au changement des deux saisons de l’année, les Matari’i i raro et Matari’i i ni’a, pour mieux en marquer l’importance et le louer.

Ces réjouissances auxquelles toutes les couches sociales étaient invitées épuisaient les ressources des communautés d’accueil qui mettaient des mois à s’en remettre.

Mais qu’importe !

Le passage des ‘arioi était intimement lié aux promesses d’abondance à venir.

Malheureusement, on garde peu de témoignages et de transcriptions de ces tournées. Transmission orale oblige, les premiers textes décrivant la société polynésienne et ce pan de l’éducation des masses datent des premiers navigateurs européens.

Si Arue a tenu à rappeler par cette construction, dans les jardins de la mairie, le rôle des ‘arioi dans la transmission de la culture polynésienne, elle ne pouvait raisonnablement réaliser leur fare à l’échelle.

Il ne s’agit pas non plus d’en faire le dernier témoignage d’une caste qui n’a pas survécu à l’arrivée des Occidentaux et de leurs nouvelles croyances.

On peut, et l’on doit, s’approprier le lieu pour lui redonner son crédo culturel.

Les écoles sont donc invitées à s’approprier le lieu, pour des cours d’histoire, la répétition de ‘ōrero…

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Au même titre que les ari’i, la confrérie ‘arioi était régie par des règles précises, et répondait à une hiérarchie divisée en huit classes, clairement reconnaissable selon des codes vestimentaires et des tatouages tout autant codifiés.

Ce maintien faisait partie

Quelques soit sa naissance et sa couche sociale, on pouvait prétendre entrer dans la confrérie. Une initiation permettait de retenir les meilleurs et les plus aptes à véhiculer avec talent l’héritage des connaissances.

Les plus hautes instances ari’i et ‘arioi pouvaient toutefois passer outre cette intronisation. Mais l’élu désigné ne pouvait déroger à son noviciat pour pérenniser la qualité des représentations qu’il allait être amener à produire.

Si les deux sexes étaient admis, il n’était pas permis aux enfants, ni aux novices d’en avoir.

Les ‘arioi étaient étroitement lié au dieu ‘Oro et à un pan de sa légende portant sur son mariage d’avec Vai-rau-mati.

Avant chaque représentation, les ‘arioi consacraient une cérémonie à leur dieu :

« Les deux sœurs de ‘Oro descendirent sur terre pour lui trouver une nouvelle épouse, après qu’il l’eut perdue en la précipitant sur la terre.

Dans leur recherche, désespérant de trouver une femme digne de lui, elles finirent par se rendre à Bora Bora où on leur parla d’une jeune fille de sang royal d’une incomparable beauté nommée Vai-rau-mati (Eau de ficus tinctoria).

Comblant leur espérance, Vai-rau-mati accepta de devenir l’épouse de ‘Oro.

Le mariage eut lieu et l’épouse reçut des présents de toutes parts, ce qui embarrassa ‘Oro, car n’étant pas humain, il n’avait rien de terrestre à offrir et craignait de se couvrir de ridicule.

Il eut l’idée de changer deux serviteurs de ses soeurs, Uru-te-tefa (tête sans valeur) et ‘Oro-te-tefa (guerrier sans valeur) l’un en verrat et l’autre en truie. C’étaient les plus beaux spéciments qu’on eût jamais vus.

Il les nomma tous deux ’Oro-i-te-pua’a-mahui (’Oro dans le cochon révélant des secrets) et décida qu’ils ne seraient jamais mis à mort.

« Maintenant, déclara triomphalement ‘Oro, j’ai un cadeau digne de mon épouse » et les emmena sur terre le long d’un arc-en-ciel.

Les deux sœurs de ‘Oro pleurèrent amèrement leurs deux serviteurs qu’elles avaient toujours considérés comme des frères.

Arrivé auprès de sa femme, ‘Oro lui offrit les deux cochons avec un bouquet de plumes rouges qu’il nomma Uru-maru-no-te-arioi (bosquet ombreux des arioi).

Ces deux cochons devinrent les dieux des Arioi, gardant leurs noms de Uru-te-tefa et ‘Oro-te-tefa.

La nuit suivant le cadeau à Vai-rau-mati, la truie mit bas cinq petits porcelets mâles.

Le premier devint le premier cochon sacré des arioi et fut nommé ‘Oro-i-te-tea-moe (Guerrier à la lance à terre).

Le second fut jeté à la mer et devint un marsouin.

Le troisième devint l’animal familier de l’épouse de ’Oro.

Le quatrième était destiné aux voyages en différents pays.

Et le cinquième était destiné aux marae. Son caractère sacré était symbolisé par une cordelette passé dans le nez. »